Tandis qu’il vient se recueillir sur la tombe familiale du cimetière de Leeds, un poète découvre toutes les tombes taguées par des skins : des hooligans, avec leurs habituelles croix gammées, noms des clubs de foot, injures contre les immigrés, insultes aux anciens métiers gravés sur les dalles des défunts, etc.​

À partir de cette découverte où TOUT fait déjà métaphore « d’un monde » qui a sombré et du drame du nôtre qui s’écroule par-dessus, notre poète est pris d’une rumination folle. Celle-ci l’emmène assez loin pour engager une dispute avec l’un de ces skins dont on ne saura jamais s’il fut présent ou a surgi seulement dans sa tête. Débat violent car en face du désastre social qui serait « à l’origine de leur geôle », la poésie pourrait bien être mise à terre. On comprendra très vite que ce combat a lieu à l’interne de la conscience tourmentée du poète.

Parmi les mots graffités, il y a partout ces « V », tous des « contre » (versus), dont les hooligans usent à l’envi pour batailler entre clans ou équipes.

Choix des armes pour notre poète estomaqué : se battre encore avec des mots, même quand les mots n’ont plus de sens. C’est ce qu’il fera jusqu’au soir plutôt qu’effacer les insultes.

Tony Harrison donne à la poésie ce rôle politique, engagé, pour éveiller, réveiller les consciences, donner accès à une langue de la rue, pour la confronter à l’élite anglaise. Le fond du texte décrit aussi la lutte amère dans les mines de charbon, le nord industriel anéanti par le thatchérisme et tous les vieux métiers rejetés en si peu de temps. L’air libéral entre de plein fouet.